Élise Marjolin-Guidoni
Traversée

Traversée

Élise Marjolin-Guidoni

À Jean-Mathias Pré-Laverrière

Je voudrais vous parler de vies qui ont eu lieu sous le signe d’une traversée, que ce soit d’une traversée première, ou d’une traversée qui les a hantées, parce qu’elles l’ont désirée, répétée, inventée, écrite. La première de ces vies est la mienne puisque ma mère traversa l’Atlantique en 1945, pour rejoindre l’homme qu’elle avait épousé à Washington quelques mois plus tôt. Plus décisive encore pour moi fut la retraversée, ou le premier retour au pays natal, qu’elle accomplit avec moi âgée de douze mois. Cette présentation a pour origine une réflexion sur les langues, ce qu’on appelle le bilinguisme, la pluralité des langues non pas seulement qu’on parle mais avec lesquelles on a une relation d’être, une relation d’appartenance à chacun de leurs univers. Si je suis passée de la dualité des langues a désirer parler de la traversée c’est d’une part parce qu’elle est présente dans ma vie à l’origine, et que dans mes efforts pour en comprendre le déploiement, en moi-même et dans les auteurs dont je parlerai, il ne s’agissait essentiellement ou exclusivement de la langue, de la mer, de l’espace, de l’enfance, des univers mais du choc de leurs présences et de leur confrontations. Joseph Conrad après une enfance en Pologne choisit la mer, la rejoignit, choisit la marine et la langue anglaise qu’il dut apprendre. Les traversées de Faulkner à partir d’une enfance engloutie dans la mémoire d’une guerre et d’une défaite, sont des traversées temporelles, à travers les générations.

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